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25 octobre 2008 6 25 /10 /octobre /2008 18:12



J’ai toujours un peu de mal, lorsque j’ai envie de commenter sérieusement un tableau de Dali, depuis que j’ai lu que la vue d’un fromage laissé trop longtemps au soleil avait inspiré à Dali une de ses plus fameuses toiles : les Montres molles. Difficile après ça de se lancer dans une vaste explication sur la portée symbolique de son œuvre…

Cela me rappelle un reportage sur France 3, concernant un élève de l’école des beaux-arts. Celui-ci avait eu une idée sublime: il avait organisé son mariage et l’avait présenté en tant qu’œuvre artistique, sous le regard interloqué de ses professeurs. Ce jeune artiste était très fier de son travail et en parlait avec une certaine emphase. Mais il avait regretté, en conclusion du reportage, le manque d’enthousiasme de ses profs, incapables de comprendre toute la portée de son acte créateur.

Bref, bref, je reviens à Dali, qui aimait se mettre en scène, lui aussi, mais possédait au moins un réel talent. À ce sujet (ça va finir par se voir que j’ai plutôt envie d’évoquer le personnage Dali que ses tableaux…), j’aime bien une autre anecdote. Picasso se rend dans l’atelier de Dali, qui lui présente tout son travail. Picasso ne dit un mot de compliment, il regarde les toiles en silence. Ensuite, il invite Dali dans son atelier et présente à son tour plusieurs de ses toiles. Son hôte ne dit rien. À la fin, les deux hommes se séparent sur un simple regard signifiant : "Compris ? Compris !" En clair, "j’ai du génie et toi aussi".

 

Enfin, c’est à Dali qu’on doit cette anecdote. Il a dû la réarranger à sa sauce (peut-être bien que Picasso, en réalité, lui a montré toutes ses œuvres pour l’écraser sous son génie, tout en observant les siennes avec dédain… Dali se serait dans ce cas légèrement trompé en interprétant le regard lancé par Picasso).

Mais j’en arrive au célèbre Christ de Saint Jean de la Croix. J’ai énormément aimé cette œuvre, quand j’étais étudiant. Sans l’admirer autant qu'alors, je la trouve encore impressionnante. Plusieurs œuvres contemporaines de Dali témoignent d’un mysticisme religieux (La Madone de Port Lligat, La corbeille à pain ou la Tête raphaélesque éclatée), ce thème l'obsédait apparemment.

 

  

 

 


Dali, avec ces oeuvres, a semble-t-il voulu repenser la relation entre le spectateur et la figure de Jésus crucifié. Il l'a peinte selon différents angles: une croix verticale mais vue par au-dessus (Christ de Saint Jean de la Croix), ou par en dessous (L'Ascension et Corpus Hypercubus), ou bien encore une croix représentée à l'horizontale et vue par derrière (Le Christ de Gala).

Le désir de Dali était-il de réaliser avant tout des "tours de force techniques", de repenser la perspective? Je ne sais pas trop et ce n’est pas là le plus important : ces oeuvres sont vraiment de qualités, surtout le Christ de Saint Jean de la Croix, et on peut les admirer même sans être bien sûr de l’intention de l’auteur. Toutefois, dans le Christ de Saint Jean de la Croix, au sommet de la croix, on remarque un petit papier. Voilà qui rappelle les œuvres religieuses de la Renaissance : dans certains tableaux, les artistes de cette époque (qui ont tant réfléchi aux problèmes de perspective...) mettaient leur signature sur ce genre de papier. La référence aux grands artistes de la Renaissance, auteurs de nombre de chefs-d’œuvre religieux, paraît au moins évidente.

 

 

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25 octobre 2008 6 25 /10 /octobre /2008 16:26

Je viens de finir Aden Arabie, de Paul Nizan. C’est la fameuse phrase « J’avais vingt ans. Je ne laisserai personne dire que c’est le plus bel âge de la vie » qui m’a donné envie de découvrir cette œuvre. Mais c'est surtout sa préface qui m'a surpris.


Avant cette lecture, je ne savais rien de cet auteur. J'ignorais donc son amitié avec Sartre, qui signe la préface d'Aden Arabie, ainsi que les manoeuvres politico-littéraires dont Nizan a été la victime.

Nizan eut très tôt la volonté d'agir politiquement, ce qui le conduisit à des choix radicalement opposés (mais c'était justement la radicalité qui l'attirait avant tout), il fit un bout de chemin avec le premier parti fasciste français, puis s'engagea en faveur des communistes. Sartre expliquait cette incohérence apparente par le tissu de contradictions que fut la vie de Nizan.

Ce fut Aden Arabie qui permit à Nizan de se faire un nom dans les milieux intellectuels. Il se singularisa ensuite par le ton de ses textes (romans ou articles, il était aussi journaliste) acerbe, sans complaisance, engagé (ce qui l'amena à écrire des perles, il décrivit ainsi l'URSS comme le "pays de la paix").

Mais il était souvent lucide. Il dénonça en 1939 le pacte germano-soviétique et rompit avec le PCF. Après cela, aux yeux de certains intellectuels communistes, il devint un ennemi à abattre. Aragon le décrivit tel un traître dans les Communistes (1949).

Et ce fut justement la préface de Sartre, à l'occasion de la réédition d'Aden Arabie, en 1960, qui permit de réhabiliter Nizan. Quelques années après, sentant apparemment le vent tourner, Aragon supprima des Communistes les passages incriminant le pseudo traître.

Cette préface de Sartre m'a vraiment intéressé. Déjà, il reconnaît plusieurs de ses erreurs, admet son aveuglement ou sa lâcheté face à certaines pratiques de ses camarades de l'époque, et rien que cela mérite le coup d'oeil. (J'estime beaucoup Sartre en tant qu'écrivain, c'est pour moi l' auteur de romans excellents et de deux des plus fortes pièces de théâtre du XXe siècle, les Mouches et Huis clos. En tant qu'homme ou intellectuel, mon estime pour lui descend de quelques degrés, en revanche...)

Sartre rend hommage à celui qui fut son ami, à son intransigeance, sa lucidité. Il souligne également ses paradoxes (ce grand rebelle s'est empressé de se marier et recherchait une forme de stabilité bourgeoise). C'est une introduction très intéressante à un roman qui m'a paru vraiment bon (la première page est un morceau).

Aden Arabie
est loin d'être le livre le plus jovial qui soit, le ton est amer, passionné, ironique, acerbe... il raconte les désillusions éprouvées par l'auteur lors d'un voyage en Orient.

"Orient, sous tes arbres à palmes des poésies, je ne trouve encore qu’une autre souffrance des hommes."



À en croire Sartre, Antoine Bloyé et la Conspiration sont les véritables chefs-d'oeuvres de Paul Nizan. Aden Arabie, où se lit toute la révolte d'un jeune homme profondément déçu, m'a donné envie de mieux découvrir son oeuvre.

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